« Nous avons divisé le monde en deux camps : ceux qui proposent leur aide et ceux qui ont besoin d’aide. En réalité, nous sommes dans les deux camps. »Le Pouvoir de la vulnérabilité, Brené Brown
Chez les Fabuleuses, on cite très souvent cette phrase de Brené Brown mais autant dire que chez les Fabuleuses aidantes, elle pourrait presque être une devise ! Je m’appelle Laure et je suis psychologue, ex-journaliste et maman de trois garçons.
J’ai d’abord connu les Fabuleuses en tant que participante, émerveillée par ces articles et ces programmes qui m’ont beaucoup déculpabilisée à l’égard de mon idéal de la maternité.
En parallèle, j’ai découvert que mon fils aîné était « atypique » (haut potentiel et hypersensible), ce qui m’a aidée à accepter que tout soit un peu plus compliqué avec lui, sans que cela signifie pour autant que je m’y prenais comme un manche en tant que mère
Alors quand Anna m’a proposé de rejoindre l’équipe dédiée à ce nouveau site des Fabuleuses aidantes, je n’ai pas hésité :
Oui, bien sûr, j’avais à mon tour envie d’aider d’autres mamans à faire briller leur fabulosité !
Et tout particulièrement celles qui aident au quotidien un proche ayant des besoins spécifiques…
Car oui, ceux qui aident ont aussi besoin d’être aidés.
Moi-même, même si j’adore mon métier de psychologue, je sens certains soirs combien je me sens chargée de toutes les histoires et émotions que j’ai accueillies pendant ma journée de travail. J’ai beau y avoir été formée, je suis humaine et certaines situations me touchent plus que d’autres… Mais mon premier réflexe est souvent de réprimer ce ressenti, en me disant :
« Allons, sois forte, les patients comptent sur toi ! »
Par ailleurs, je m’en veux de ne pas toujours agir avec tact auprès de mes proches (enfants, conjoint, amies…), comme si ma casquette professionnelle et tout mon travail thérapeutique personnel déjà réalisé me prémunissaient désormais de tout faux pas. Je dois alors faire un véritable effort pour reconnaître ma vulnérabilité et accepter que moi aussi, j’ai encore et toujours besoin d’être soutenue, par d’autres professionnels mais aussi par mes proches pour qu’ils me considèrent juste comme une maman/conjointe/amie aussi fabuleusement imparfaite qu’eux… !
En réfléchissant à ma propre difficulté à renoncer à une certaine toute-puissance, j’ai eu envie de creuser ce sujet de la vulnérabilité exacerbée de « ceux qui proposent leur aide ». Et j’ai découvert que la souffrance des soignants était aujourd’hui reconnue comme une véritable préoccupation de santé publique : en moyenne, 25 % des infirmières actives de pays occidentaux présentent un niveau élevé d’épuisement professionnel quels que soient le milieu de travail et la spécialité.
La théorie du burn-out a d’ailleurs été initialement conçue à propos des métiers de la relation d’aide : la définition initiale en est « une expérience psychique négative vécue par un individu, qui est liée au stress émotionnel et chronique causé par un travail ayant pour but d’aider les gens ».
En effet, ces professions exposent bien plus que d’autres à de fortes charges émotionnelles : contact avec la souffrance, la mort et la maladie, responsabilité de la santé, du bien-être et même de la survie des patients, nécessité de s’adapter constamment aux changements humains, techniques et administratifs…
Mais n’est-ce pas aussi ton quotidien à toi, Fabuleuse aidante ?
Sauf que toi, ce n’est pas nécessairement ton métier, ni ton choix, et que cette charge émotionnelle est démultipliée par le fait qu’il s’agit d’aider un proche, et non un patient ! Et surtout, tu ne peux pas avoir tes soirées, tes week-ends ou tes vacances pour souffler…
Alors non, je ne te rappelle pas ces évidences pour te ruiner le moral, mais au contraire pour souligner la charge héroïque que tu portes et que tu ne mesures sans doute pas ou plus : à force de le faire au quotidien, peut-être depuis de nombreuses années, tu considères probablement que c’est normal.
Je voudrais donc juste te rappeler qu’en tant qu’aidante, tu offres énormément de toi et que pour équilibrer ta balance, tu as besoin d’aide toi aussi.
Il n’y a aucune honte à en demander, au contraire :
Accepter ses limites est le meilleur cadeau à faire non seulement à nous-même, mais aussi à nos proches.
Tu vas sans doute me dire que justement, personne ne peut t’aider… et je sais bien qu’en effet, beaucoup d’aidants sont très seuls pour assumer leurs tâches. Mais je suis convaincue que le principal frein est souvent de se sentir légitime pour déléguer :
« C’est moi la mère/la conjointe/la fille, c’est à moi d’assumer ! »
Tu la connais, cette petite phrase poison ?
Alors je t’invite de tout cœur à repenser à toutes ces infirmières dont c’est le métier de prendre soin, qui l’ont choisi et qui y sont formées et qui, pourtant, s’y épuisent.
Tu as le droit, toi aussi, de trouver ta charge lourde et de demander du soutien : cela n’enlève rien à ta valeur ni à l’amour que tu portes à ton proche.